Depuis le début de la semaine, des négociations se sont ouvertes à Genève autour de la biodiversité. L’objectif est ambitieux : il s’agit de définir un cadre mondial efficace pour la protection des espèces végétales et animales, aussi important que l’Accord de Paris sur le climat, en vue d’une adoption lors de la deuxième partie de la COP15 qui se tiendra à Kunming, en Chine, au cours de cette année.

Ces discussions revêtent une importance capitale pour les fondements même de notre vie sur Terre. Les espèces végétales et animales disparaissent en effet à un rythme effréné, sans précédent dans l’histoire humaine. Selon un rapport de 2019 de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), considérée comme le GIEC de la biodiversité, un million d’espèces, sur un total estimé à 8 millions, est menacé d’extinction dans les prochaines décennies. Certain-e-s considèrent même que nous sommes en train de vivre la sixième extinction de masse de l’histoire de notre planète. Les causes du déclin de la biodiversité en cours sont multiples, mais toujours liées à l’activité humaine: sont ainsi pointés du doigt les changements d’usage des terres et de la mer (principalement l’intensification et l’extension de surfaces agricoles), la surexploitation des ressources naturelles, le changement climatique, la pollution des eaux, des sols et de l’air, ainsi que la prolifération d’espèces exotiques envahissantes (rendue possible par l’essor rapide des voyages et du commerce).

Malgré l’importance capitale de la biodiversité pour la vie sur Terre – car c’est bien grâce à elle que nous disposons d’air pur, d’eau douce, d’un sol de bonne qualité et de la pollinisation de nos cultures -, les efforts entrepris jusqu’à présent pour la préserver se sont révélés inefficaces. Les précédents engagements internationaux en faveur de la biodiversité pour la période de 2011 à 2020, les « Objectifs d’Aïchi», se sont en effet soldés par un échec cuisant. Sur les 20 objectifs adoptés en 2010 par les 195 États parties de la Convention sur la diversité biologique (CDB), aucun n’a été complètement atteint et seul six l’ont été partiellement.

Aujourd’hui, tous les regards se tournent donc vers Genève, avec l’espoir que les négociations en cours puissent aboutir à un accord historique. Car comme le souligne l’IPBES, il n’est pas trop tard pour agir, mais seulement si nous commençons à le faire maintenant, et à tous les niveaux, du local au mondial. Pour mettre un terme à la perte de biodiversité d’ici 2030 (cadre mondial pour la biodiversité post-2020), une vingtaine d’objectifs sont en cours de définition à Genève, parmi lesquels « qu’au moins 30% des zones terrestres et des zones maritimes (…) soient conservées grâce à des systèmes de zones protégées et d’autres mesures de conservation efficaces». Actuellement, cette part n’atteint que 6% du territoire suisse et environ 16% dans le monde.

Il s’agit cependant d’aller au-delà de mesures portant sur la seule conservation de la nature et d’inclure un engagement concret de la part des pays dans la réduction des impacts de l’industrie, de l’agriculture et de l’aménagement tout au long de la chaîne d’approvisionnement. En clair, aujourd’hui, nous devons placer la biodiversité au centre de toutes les politiques qui façonnent nos modes de production, de consommation et d’aménagement.

La Ville de Genève suit évidemment avec beaucoup d’attention les discussions en cours. Depuis une dizaine d’années, plusieurs services municipaux travaillent afin de connaître, de protéger et de favoriser la biodiversité animale et végétale du territoire communal. En février dernier, l’adoption de sa Stratégie climat a représenté un nouveau jalon dans l’action de la Ville en la matière. L’axe 6 de cette stratégie est en effet articulé autour de trois objectifs : la protection et la restauration des écosystèmes naturels, la préservation des sols et le développement de leur potentiel de captation de CO2, et l’amélioration de nos connaissances sur la biodiversité urbaine. Dans ce cadre, une « Stratégie Biodiversité Municipale » est en cours d’élaboration. Elle permettra à la Ville de Genève de mettre en place une série de mesures et d’indicateurs, et ce faisant, d’adopter une politique de protection de la biodiversité ambitieuse et transversale.

Grâce à sa politique du « zéro phyto », le Service des espaces verts (SEVE) observe une plus grande diversité végétal en Ville de Genève. Depuis l’abandon des produits chimiques il y a une dizaine d’années, l’absence de polluants dans l’eau, l’air et le sol contribue au bon développement des populations d’oiseaux, qui bénéficient d’une chaîne alimentaire beaucoup plus propre. C’est ainsi que des espèces qui avaient quasiment disparu investissent désormais la ville, parfois chassées de nos campagnes où les bocages et autres haies se font malheureusement rares et où les pesticides sont encore trop répandus. Gestion différenciée, prairies fleuries, plantation massive d’arbres, restauration et / ou création de zones humides sont encore d’autres exemples de ce sur quoi nous travaillons avec le SEVE pour accroître la biodiversité.

La nature peut encore être conservée, restaurée et considérée sur un temps long. Il s’agit de nous mobiliser dès aujourd’hui, pour ce faire.